Mark St. John est une figure incontournable de l’histoire récente des Pretty Things. Manager, producteur, avocat, batteur et choriste à l’occasion, ses casquettes sont multiples.
Durant la première moitié des années 1970, le batteur Mark Ibbotson monte une série de groupes baptisés England. Cette formation finit par se stabiliser en 1975 avec le claviériste Robert Webb, le guitariste Jamie Moses (bientôt remplacé par Franc Holland) et le bassiste Martin Henderson. Le quatuor, dont la musique est dominée par le mellotron (scié en deux !) de Webb, signe un contrat avec Arista Records en mars 1976, mais Ibbotson choisit de quitter le groupe à ce moment-là. C’est donc avec un autre batteur, Jode Leigh, que England enregistre son unique album, Garden Shed. (Ibbotson réutilisera le nom du groupe en 1983-1984 pour une paire de 45 tours enregistrés avec Holland et publiés par Jet Records.)
Ibbotson, ou Mark St. John (impossible de dire quand exactement il a commencé à se faire appeler ainsi, au risque d’être confondu avec l’éphémère guitariste de KISS), choisit quant à lui de passer derrière la console. Alors qu’il travaille comme opérateur aux Surrey Sound Studios sur le premier album de The Police, l’ingénieur du son Nick Smith (le fils de Norman Smith) lui fait écouter Savage Eye, qui est alors le dernier album en date des Pretty Things. Le coup de foudre est immédiat, et St. John n’a plus qu’une idée en tête : travailler avec eux. Au printemps 1981, il parvient à les convaincre d’enregistrer une poignée de chansons aux Freerange Studios, un petit studio londonien, mais la force centrifuge finit par avoir le dessus et les sessions ne débouchent sur rien de concret. Lorsqu’il se rend chez Phil May pour lui rendre les bandes de ces enregistrements, en 1983 ou 1984, il reçoit un tel accueil qu’il se promet de ne plus jamais avoir affaire aux Pretty Things.
Évidemment, Mark St. John croise à nouveau le chemin du groupe en 1987. Cette fois-ci, c’est dans son propre studio de Soho, les Basement Studios, qu’il les fait travailler sur un nouvel album. Il garde ses distances, laissant l’Américain Denny Bridges se charger de la production. Le résultat ne satisfait personne, et une nouvelle formation se met en place autour de Phil May et Dick Taylor, avec Frank Holland à la guitare, Steve Browning à la basse et St. John lui-même à la batterie. Cette formation publie un maxi 45 tours en 1989, Eve of Destruction / Can’t Stop / Goin’ Downhill.
Tandis que May et Taylor continuent à donner des concerts dans toute l’Europe, St. John, qui est également devenu leur manager, se penche sur la querelle juridique qui oppose le groupe à EMI et Phonogram concernant les droits sur le catalogue des Pretty Things, entre autres choses. La situation est réglée à l’amiable fin 1993 : en échange de l’abandon des poursuites, les gros labels cèdent leurs droits aux membres du groupe, ainsi qu’une certaine somme d’argent. Le moment est on ne peut mieux choisi, car ces années passées dans les tribunaux ont coûté cher à St. John, qui a dû vendre son studio de Soho et se retrouve à peu près sur la paille.
Le règlement des questions de droits permet la parution de la compilation rétrospective Unrepentant en 1995. En chapeautant ce projet, St. John se lie d’amitié avec Peter Grant, le manager des Pretty Things période Swan Song, qui meurt quelques mois après la sortie de l’album. C’est à lui qu’est dédié le nouvel album studio des Pretties, Rage Before Beauty, qui voit le jour en 1999, au terme de près de vingt ans de luttes pour un St. John tout aussi tenace que son modèle.
En bon manager, Mark St. John continue depuis à protéger farouchement les arrières du groupe et à chanter ses louanges dès qu’il le peut. Impossible de le rater lors de leurs concerts, avec sa silhouette imposante, son scalp dégarni et sa longue queue de cheval. Sa réputation de défenseur des groupes floués par les requins de l’industrie des disques l’a également conduit à travailler avec les Bay City Rollers, pour qui il a obtenu un règlement à l’amiable avec Arista Records.