Pochette de l'album Resurrection.

Le 6 septembre 1998, les studios Abbey Road sont le théâtre d’un anniversaire exceptionnel. Pour célébrer les quarante ans de S. F. Sorrow et préparer sa réédition chez Snapper Records, les Pretty Things donnent un concert unique devant un public trié sur le volet, amis et famille principalement. La formation de la grande époque est au complet : Phil May, Dick Taylor, Wally Waller, Jon Povey et Skip Alan sont tous là, tous tirés à quatre épingles, épaulés par Frank Holland à la deuxième guitare et Dov Skipper (le fils de Skip Alan) aux percussions, sans oublier évidemment Mark St. John. Quelques invités de marque sont aussi au rendez-vous : Arthur Brown se charge de réciter les interludes narratifs entre les chansons, tandis que David Gilmour vient poser quelques nappes de guitare sur plusieurs titres. Cette performance exceptionnelle est diffusée en direct sur Internet, une première, même si les débits médiocres de la fin des années 1990 ne permettent guère aux fans d’en profiter. Cette soirée mémorable est immortalisée par l’album live Resurrection et la vidéo S. F. Sorrow Live at Abbey Road.

Pochette de l'album Rage Before Beauty.

L’année suivante apparaît Rage Before Beauty, le premier véritable album studio des Pretty Things en près de vingt ans. Sa conception a été longue et difficile. Certains enregistrements remontent à 1981, on retrouve également la reprise de Eve of Destruction de 1989 dessus, mais la plupart des chansons sont inédites et prouvent que le groupe a toujours quelque chose à dire. D’après la légende, Skip Alan aurait proposé de baptiser l’album Fuck Oasis and Fuck You, une suggestion qui n’a étonnamment pas été retenue.

Revitalisés, les Pretty Things donnent de nombreux concerts en Europe et aux États-Unis dans les années qui suivent, devant un public où les vieux de la vieille cohabitent désormais avec une nouvelle génération qui a découvert le groupe à la faveur des rééditions CD. La fatigue commence cependant à se faire sentir pour Skip Alan, qui arrête la scène fin 2001. Pour le remplacer derrière les fûts, c’est Mark St John ou parfois Jon Povey qui s’y collent.

Pochette de l'album Balboa Island.

Le successeur de Rage Before Beauty se fait longtemps attendre. En fin de compte, c’est en revenant à leurs racines les plus profondes que les Pretty Things parviennent à accoucher de Balboa Island en 2007. C’est un disque aussi sombre et dépouillé que sa pochette. La voix vieillie de Phil May s’accorde à merveille à la noirceur de titres comme (Blues for) Robert Johnson, un hommage torturé à la figure légendaire de l’histoire du blues, ou bien la reprise de Ballad of Hollis Brown de Bob Dylan.

Pochette de l'album Live at the 100 Club.

Les Pretty Things prennent un nouveau départ après la sortie de Balboa Island. Jon Povey et Wally Waller prennent leurs distances, principalement à cause de leurs relations tendues avec Mark St John, et le groupe accueille deux jeunes musiciens, Jack Greenwood à la batterie et George Woosey à la basse. Privée de claviériste, cette nouvelle formation propose un son plus sec et brut qui rappelle davantage les années glorieuses des petites salles londoniennes. Comme pour boucler la boucle, les Pretties donnent un concert exceptionnel au 100 Club en décembre 2010, durant lequel ils interprètent en intégralité leur premier album. Ce concert très nostalgique est édité quelques années plus tard sous le titre Live at the 100 Club.

Pochette de l'album The Sweet Pretty Things (Are in Bed Now, of Course...).

Après une petite alerte concernant la santé de Phil May courant 2014, 2015 voit la sortie du douzième album studio des Pretty Things, The Sweet Pretty Things (Are in Bed Now, of Course…) Sous ce titre à rallonge et sa pochette colorée signée Phil May se cachent dix nouvelles chansons, dont deux reprises. Si Balboa Island était placé sous le signe du rhythm and blues, ce nouvel album lorgne davantage du côté du psychédélisme de l’époque S. F. Sorrow. Il y a même du mellotron !

Et puis, le 13 décembre 2018, les Pretty Things donnent leur dernier concert électrique à Londres. Pour l’occasion, plein de vieux camarades les rejoignent sur scène, comme Jon Povey, Wally Waller et Skip Alan, mais aussi David Gilmour ou Van Morrison. Ce dernier coup d’archet ne met pas un terme à l’existence du groupe, contrairement à ce que rapportent çà et là des journalistes trop pressés. May et Taylor donnent quelques concerts en acoustique au cours de l’année 2019 et travaillent avec Mark St. John sur un nouvel album studio au son dépouillé.

Et puis, le 15 mai 2020, l’annonce terrible est tombée : Phil May est mort. Alors que le monde est en pleine pandémie, cet éternel contrariant a préféré tirer sa révérence à la suite d’une chute de vélo. Cette fois-ci, l’histoire a bel et bien trouvé son point final, aussi inattendu que définitif. Resteront un catalogue exceptionnel et des souvenirs à revendre. The beat goes on.

Cet article a 6 commentaires

  1. lienard

    Génial et à lire leur histoire, j’en ai eu les larmes aux yeux, je suis évidemment un fan des Pretty mais par rapport à toi !!!

    J’ai vu les Pretty à Bruxelles, au Théâtre 140 .. en octobre 1972, avec le Variations en guest .. soirée d’anthologie.

    Puis, ayant repris la route des concerts, j’ai revu 2 fois les Pretty, en 2009 et 2010, et là, je me fous toujours des baffes, car après le concert de 2010, Phil May a été respirer l’air du dehors et il était à 1 mètre de moi .. j’ai pas osé l’importuner , mais-je bien fait ?

    J’aurais dû lui arracher sa chemise :-)) ..

    Les 2 derniers concerts étaient au Spirit of 66 à Verviers, toujours en Belgique.

    Encore un grand bravo pour l’écriture :-)))

    1. Julien Brice

      Content d’avoir fait remonter des souvenirs ! Je regrette moi aussi de ne pas avoir eu l’occasion de papoter avec les membres du groupe les deux fois où j’ai eu l’occasion de les voir, mais je me dis que je n’aurais pas eu grand-chose à leur raconter. Et arracher leurs chemises, à leurs âges, est-ce bien raisonnable… ? 🙂

  2. Vince

    Skip allan as ceder sa place a mark st john et a jhon povey a partir d’avril 2001.

    suite a un probleme cardiaque (une attaque si ma memoire est bonne).

    le premier concert donner par le groupe avec St john aux baguette est le concert de gonfreville l’orchet (dispo en bootleg).

  3. Pierre

    J’ai découvert ( disons plutôt vraiment écouté) the Pretty Things en 2018 …. j’écoute de la pop du rock depuis mes 14 ans ( Donc ça fait 40 ans) et je suis complètement passé a cote d’un groupe que j’élève au rang de génie de la musique … depuis j’essai de rattraper le temps perdu en écoutant presque quotidiennement les Pretty Things , en m’offrant tout ce qui existe sur eux
    ( le coffret « Bouquets from a cloudy sky » le magnifique Final Bow, Philippe Debarge… bref tout ce qui tourne autour des Pretty Things et évidemment la découverte de ce site dédié aux Pretty Things … Merci mille fois pour votre partage de passion
    et puis ça m’a aussi permis de réécouter des anciens groupes que j’avais peut être sous estimés( Et bingo avec un groupe qui s’appelle STRAY …. et toujours en activité) Triste pour May , néanmoins heureux de pouvoir les écouter pendant je l’espère des nombreuses années…. Encore merci a toi

    1. Julien Brice

      Merci ! C’est réconfortant de voir que les Pretty Things acquièrent progressivement le public qu’ils auraient mérité d’avoir depuis toujours. Leur musique leur survivra, comme toutes les bonnes musiques.

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